Le pet (I)
(Poésie)
Non, le vent qui boursoufle un piètre
pédagogue
Ou qui pousse en dérive une
faible pirogue,
L'air qui dore et blêmit les
bulles de savon,
Qui couvre de frimas tout le sol esclavon,
La rafale qui hurle au col de la montagne
Et blanchit les galets des côtes
de Bretagne,
Le souffle printanier au murmure coquet
Qui pousse les amants au jeu du bilboquet,
L'ouragan qui saisit et terrasse le
navire,
L'haleine qui s'exalte d'un baiser
d'Elvire,
La bise qui décolle perruques
et toupet
Ne sont rien mes amis auprès
d'un vaste pet !
Le pet, c'est le bonheur ! Le pet, c'est
la nature
Qui des sucs végétaux
arrache un doux murmure
Prélude instrumental, harmonique
factum
Qui module des airs au tube du rectum.
Ainsi que Rossini dont le cerveau s'embrase
Quand il jette au papier sa poétique
phrase,
Le grand boyau culier fait gronder
en son blanc,
Pétrit, module et pond la gamme
qui descend.
C'est d'abord un soupir plein d'amères
tristesses
Qui s'étend de l'anus aux rives
des deux fesses,
Puis s'étale, descend, s'échappe
de prison
Et sors des plis étroits d'un
pudique jupon.
La vesse (*)
aux vils détours, c'est la diplomatie
Traquant une Bonaparte expulsé
d'Helvétie,
Écrasant la Pologne, étouffant
ses clameurs
Disant au Luxembourg: prends ton linceul
et meurs !
La vesse est un poison comme ces diplomates
Que les peuples devraient marquer aux
omoplates.
Mais le pet ! C'est César conquérant
des gaulois,
Qui traînait à son char
les dépouilles des rois !
Le pet, contrarié dans ses élans
fertiles
C'est un Léonidas mourant aux
Thermopyles
Le pet, c'est l'Empereur et son petit
chapeau
Qui faisait frissonner les princes
dans leur peau,
Qui lorsqu'il les battait avec tant
de largesse
Pouvait se dire alors : " Tous les
rois ont la vesse ! "
Hourra ! Vive le pet ! A bas les vents
coulis !
Frictionnez vous les reins et pétez
dans vos lits !
(*) Vesse : Émission
de gaz nauséabond, faite sans bruit par l'anus.